Revue Française de la recherche
en viandes et produits carnés

ISSN  2555-8560

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Résumés - Hygiène et Sécurité sanitaire

La sécurité sanitaire est un enjeu crucial en abattoir bovin et doit être maitrisée dès la chaîne d’abattage. La contamination des carcasses provenant majoritairement du cuir de l’animal, cette étude a expérimenté l’application d’un gel antibactérien pour réduire le transfert de contamination du cuir vers la carcasse. Réalisé à partir d’éthyl lauroyl arginate (LAE®), le potentiel inhibiteur du gel sur les bactéries a été testé en laboratoire in vitro et s’est révélé très prometteur pour les essais en abattoir puisqu’une diminution de la concentration microbienne allant jusqu’à 7 log UFC/ml a été observée. Lors des essais in situ, la concentration microbienne été réduite d’un log sur le cuir et la carcasse, ce qui est similaire à d’autres moyens de décontamination actuellement employés. Ce résultat est encourageant mais la réflexion autour de la méthodologie d’application doit être poursuivie pour améliorer l’effet décontaminant du gel sur le cuir des animaux. En parallèle des essais terrain, une analyse métagénétique a été effectuée pour caractériser le microbiote du cuir bovin et celui de la carcasse. Celle-ci a montré que les deux microbiotes présentaient une diversité complexe et semblable, confirmant ainsi que l’origine de la contamination de la carcasse provient principalement du cuir.

Les opérateurs des filières viandes fraîches pilotent l’hygiène de leurs procédés et de leurs productions en se référant à des critères microbiologiques qui n’ont que très peu évolué depuis des années. Or nombre de ces opérateurs observent une absence d’adéquation entre les seuils de ces critères et l’état réel de salubrité des produits. En conséquence, des enquêtes en ligne et des entretiens individuels ont été menés auprès des opérateurs des filières viandes d’herbivores, de porcs et de volailles pour identifier les difficultés rencontrées vis-à-vis du pilotage de l’hygiène avec les critères actuels et les axes d’amélioration qui pourraient être investigués. Ces opérateurs expriment des difficultés pour interpréter des cas de résultats non-conformes par rapport aux indicateurs généraux (ex : Flore Totale Aérobie Mésophile) et pour mettre en place des actions adéquates. Les critères jugés significatifs pour la gestion de l'hygiène sont ceux qui ont une incidence directe sur la qualité des produits. Ils permettent d'identifier les causes des non-conformités et facilitent la mise en place d'actions préventives et correctives. La demande de liens plus forts entre les critères microbiologiques et les évaluations sensorielles est particulièrement marquée dans les filières de viandes d’herbivores et de volailles.

Des mécanismes métaboliques de transformation du muscle aux leviers d’actions à disposition des professionnels pour influer sur la conservation de la viande, le recueil propose un panorama unique sur la qualité des viandes bovines. Afin de rendre accessible les nombreuses informations existantes sur la qualité des viandes, des experts de l’Institut de l’Elevage et de la filière ont co-construit un recueil des connaissances synthétique et pédagogique à destination des professionnels de l’amont jusqu’à l’aval, des enseignants et de tous ceux qui s’intéressent au sujet. Composé de 4 parties : présentation des procédés - qualité technologique - qualité organoleptique - méthodes, techniques et tables de références, le recueil contient 32 fiches traitant à des différents aspects relatifs à la qualité des viandes bovines, de l'élevage à la distribution. Le recueil est téléchargeable sur les sites internet de l’Institut de l’Elevage et d’Interbev.

Cette revue bibliographique donne un aperçu des connaissances sur le microbiote digestif des animaux de boucherie et sur l’effet d’une éviscération retardée sur les propriétés sanitaires des carcasses. Après la mort des animaux, l’activité bactérienne persiste avec pour conséquence une production de gaz qui dilate le tube digestif et augmente le risque de contamination de la carcasse à l’éviscération. De plus, certaines bactéries peuvent migrer naturellement de la lumière du tube digestif à la lymphe par un mécanisme de translocation. Pourtant, les quelques études scientifiques portant sur le gibier et les animaux de boucherie indiquent qu’après un délai allant de 30 minutes à 5 heures, les carcasses ne présentent pas de risque sanitaire pour la consommation humaine. Cependant, des études supplémentaires utilisant des approches omiques sont nécessaires pour déterminer plus clairement cet éventuel risque sanitaire notamment dans le cadre de l’abattage à la ferme qui induit une augmentation du délai entre la saignée et l’éviscération.

La congélation des viandes fraîches constitue un terrain favorable à la prolifération bactérienne. Ce travail vise à étudier l'effet de la méthode de décongélation sur la qualité microbiologique de la viande de chameau décongelée par rapport à la viande fraîche. Quatre échantillons de muscle de cuisse ont été prélevés pour déterminer la quantité de flore mésophile totale, de coliformes fécaux, de staphylocoques et de Salmonella dans la viande fraîche (VF) et la viande décongelée. Quatre types de décongélation ont été testés : au réfrigérateur (VR4°C), à l'air libre à température ambiante (VAL), dans l'eau froide (VEF) et dans l'eau chaude (VEC). Les résultats obtenus ont montré une bonne qualité microbiologique selon les différentes méthodes de décongélation, qui n’a pas dépassé les normes.

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Edito

Science, ingérences et persillé

Les débats sur l’avenir de l’élevage et la viande ont bien du mal aujourd’hui à se départir d’un faisceau d’apriori idéologiques, de visées politiques mais aussi d’arrière-pensées commerciales. Un rapport de l’Ecole de guerre économique présenté début décembre dans les salons du Sénat à l’initiative du sénateur du Morbihan Yves Bleunven a ainsi mis au jour les troublantes connections entre les associations animalistes et environnementalistes œuvrant en Europe, les associations « philanthropiques » américaines qui les subventionnent et les investisseurs de la « foodtech » d’Outre-Atlantique qui ont misé d’énormes sommes sur les profits éventuels à tirer des alternatives végétales et de la « viande » artificielle. Entre 2017 et 2022, l’une de ces associations -qui s’est fait connaitre par la diffusion de vidéos-chocs tournées dans des élevages et des abattoirs- a reçu pas moins de 6,1 millions de dollars, dont une part importante provenant de l'Open Philanthropy Project (OPP). En seulement six ans, écrivent les auteurs, les dons à cette association groupusculaire ont triplé, « atteignant plus de 3M$ en 2023 ». Depuis 2016, la fondation a alloué plus de 40 M€ à diverses organisations animalistes, principalement en Europe, « afin d’influencer les débats politiques et réglementaires (notamment lors des débats sur la bientraitance animale ou de la directive IED) », affirment les auteurs. Le rapport pointe également les liens flagrants entre organisations philanthropiques et investisseurs des alternatives à la viande. Les auteurs montrent notamment comment les fondateurs des associations Mercy for Animals et PETA ont fondé le Good food institute, chargé de soutenir la « foodtech ». Entre 2014 et 2023, ce fonds « a financé la recherche et le lobbying du secteur à hauteur de 21 millions de dollars ». Une ingérence aujourd’hui encore insuffisamment prise au sérieux par l’agriculture et l’agroalimentaire européens « pour lesquels il s’agit pourtant d’une question de souveraineté », estime le sénateur Yves Bleunven.
Contre toutes les simplifications, les raccourcis ou les parti-pris plus ou moins honnêtes ciblant l’élevage et la viande, plusieurs dizaines de chercheurs ont lancé un nouvel appel « de Denver » en faveur « d’une politique guidée par le souci d’une alimentation adaptée ». « Le discrédit généralisé de la viande, des produits laitiers et des œufs doit cesser afin que nous puissions revenir à des recommandations alimentaires pleinement fondées sur des preuves scientifiques, économiquement et culturellement appropriées, qui nourrissent et respectent à la fois les consommateurs et les producteurs de ces aliments, au lieu de les discréditer sans cesse », écrivent-ils, dans le prolongement de la déclaration de Dublin, prononcée en 2022 sur le rôle sociétal de l'élevage signée par plus de 1 200 scientifiques du monde entier.
https://www.dublin-declaration.org/fr/lappel-a-action-de-denver
Bien loin de ces débats idéologiques et surtout mercantiles, ce numéro de VPC s’attache à une caractéristique essentielle de la viande bovine dans le plaisir que sa consommation procure : le persillé. En six articles, nous espérons répondre à tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur ce sujet peut-être moins clivant que celui de la viande artificielle mais pas si anodin pour l’orientation de la filière bovine française. Ainsi, les chercheurs continuent de travailler sans relâche car il convient de ne pas détourner l’attention du grand public de l’essentiel, à savoir la nécessité de s’appuyer sur la science pour correctement évaluer et améliorer les systèmes d’élevage et la qualité de leurs produits dont celle de la viande.

Bruno CARLHIAN et Jean-François HOCQUETTE