
Chez les volailles, le sexe peut être déterminé sur la viande grâce à une PCR en temps réel (Chang et al., 2008).
L’authentification des morceaux pose moins de problème dans la mesure où la cuisse-pilon est constituée de plusieurs muscles dits rouges, et le filet d’un seul muscle qui est dit blanc pour le poulet et la dinde, et rouge pour le canard, la pintade et l’oie.
L’identification de la souche est importante dans la mesure où il s’agit d’un critère de démarcation des systèmes de production. Dardenne et al. (2001) ont démontré le potentiel de la Spectrométrie dans le Proche Infra-Rouge (SPIR) pour distinguer les poulets issus de souches à croissance lente des poulets issus de souches à croissance rapide. Les modèles développés envisagent aussi bien l’analyse des carcasses entières de poulets que les découpes (cuisses ou filets). Ils ont également testé avec succès la technique de l’AFLP (« Amplified Fragment Length Polymorphism »). Deux déterminants moléculaires ont été isolés, clonés et séquencés, chacun étant spécifique d’une souche.
L’alimentation est également un déterminant majeur des systèmes de production. Dardenne et al. (2001) ont évalué l’influence de l’alimentation (aliment label vs. aliment standard) sur le spectre infrarouge de la viande de poulets. Sur la base des résultats obtenus, les auteurs affirment qu’il serait possible de détecter par SPIR plus de 70% des fraudes. L’analyse des pigments caroténoïdes pour différencier les poulets élevés avec ou sans accès à un parcours est peu informative car les aliments pour volailles, en particulier dans les systèmes alternatifs, sont souvent supplémentés en pigments caroténoïdes afin de colorer en jaune la peau des poulets. Ces pigments liposolubles peuvent aussi être apportés par différentes matières premières qui rentrent dans la composition des aliments tels que le maïs ou les microalgues. L’efficacité de dépôt des pigments caroténoïdes ingérés avec l’aliment varie aussi selon le génotype. En effet, Le Bihan-Duval et al. (2011) ont mis en évidence deux SNP (« Single Nucleotide Polymorphisms ») sur le promoteur du gène codant pour la Béta-Carotène 15, 15’-MonoOxygénase (BCMO1), une enzyme clé intervenant dans la conversion du béta-carotène en rétinal. Les filets des poulets porteurs de l’un des allèles (GG) sont plus riches en pigments caroténoïdes (lutéine et zéaxanthine) et présentent une couleur plus jaune que ceux porteurs de l’autre allèle (AA). L’expression du gène est trois fois plus importante avec l’allèle (GG) comparé à l’allèle (AA) et cela traduit par un point de différence sur l’intensité de jaune (b*) dans le filet de poulet (Le Bihan-Duval et al., 2011). Néanmoins, Rhodes et al. (2010) ont réussi à différencier des régimes alimentaires contenant une large proportion de maïs (>37%) en mesurant la concentration en 13C dans les tissus de poulets (Figure 1).
Figure 1. : Effet de la teneur en maïs de l’aliment sur les valeurs moyennes en δ13C% dans les lipides et les protéines de la viande de poulets standards (n = 10) (Rhodes et al., 2010)
Le remplacement des matières grasses d’origine animale (suif et saindoux) par des huiles végétales (colza, soja ou lin), dans l’alimentation des volailles depuis 2001 en Europe a eu pour effet d’accroitre la proportion d’Acides Gras PolyInsaturés (AGPI) dans la viande de volailles. Avant cette date, un critère de démarcation des poulets Label Rouge par rapport aux poulets standards était une proportion d’AGPI dans la viande plus importante (30,9 vs. 27,2% des acides gras totaux dans les aiguillettes, Girard et al., 1993). En effet, l’alimentation des poulets Label Rouge ne contenait que des huiles végétales comme exigé par le cahier des charges, alors que celle des poulets standards contenait une proportion non négligeable de matières grasses d’origine animale. A présent, ce sont les poulets standards qui présentent une viande plus riche en AGPI que les poulets Label Rouge (30,02 vs. 21,21% des acides gras totaux dans le filet, Chartrin et al., 2005) du fait d’un apport alimentaire plus important (teneur en lipides des régimes pour poulets standards plus élevée que celle des régimes pour poulets Label Rouge) et d’une teneur en lipides de la viande plus importante également (1,25 vs. 1,18%, Chartrin et al., 2005).
Chez les volailles, l’âge à l’abattage est dépendant de la vitesse de croissance et donc du poids vif. Dans le cahier des charges du pintadeau de la Drôme (IGP), il est précisé que la pointe du sternum doit être flexible (non ossifiée). L’ossification complète intervient après 107 jours et le pintadeau est abattu à un âge compris entre 87 et 100 jours. Ce critère permet donc de vérifier qu’il s’agit bien d’un pintadeau.
Le système de production repose surtout sur la souche liée à l’âge à l’abattage, l’alimentation et l’accès ou non à un parcours. Ratel et al. (2009) ont analysé les composés volatiles du gras abdominal de poulets Label Rouge abattus à 84 jours et de Géline de Touraine abattus à 84 et 120 jours. Ces auteurs ont montré que 24 composés permettaient de distinguer les Gélines abattues à 84 et 120 jours et 70 composés permettaient de distinguer les Gélines, indépendamment de leur durée d’élevage, des poulets Label Rouge. Cette étude suggère que les composés volatiles permettent à la fois de distinguer des différences liées au génotype et à la durée d’élevage et pourraient être utilisés pour authentifier des labels dont le caractère distinctif repose sur ces critères.
De même, Ly et Zhao (2017) sont parvenus à distinguer des poulets issus de production bio et conventionnelle dans deux régions de Chine en analysant les teneurs en lipides, protéines et de douze minéraux et les ratios d’isotopes du carbone et de l’azote des filets (Figure 2).
Figure 2 : Discrimination en Chine du mode de production (bio ou conventionnel) de poulets grâce à une analyse en composantes principales des données de mesure des isotopes stables du carbone et de l’azote et de la composition chimique des filets (Ly et Zhao, 2017).
L’origine géographique repose essentiellement sur l’analyse des oligoéléments et des ratios en isotope stables (Vinci et al., 2012 ; Camin et al., 2016). Franke et al. (2008a ; 2008b ; 2008c) ont montré qu’il était ainsi possible de discriminer de la viande de poulet provenant du Brésil, de la France, de l’Allemagne, de la Hongrie et de la Suisse.
Pour tester une substitution frauduleuse de viande, l’identification de l’espèce est couramment effectuée grâce à l’analyse de l’ADN (Lago et al., 2011 ; Rahmati et al., 2016 ; Cottenet et al., 2016 ; Ren et al., 2017 ; Hellberg et al., 2017 ; Alikord et al., 2018). Pour la production de viande de canard, plusieurs espèces ou génotypes sont utilisées (Pékin, Barbarie et mulard). Hird et al. (2005) et Martin et al. (2007a) ont mis au point des tests PCR permettant la distinction conjointe de canard col-vert et Barbarie ou uniquement de ce dernier dans des mélanges de viandes issues de plusieurs espèces animales. Martin et al. (2007b) et Pegels et al. (2012) ont utilisé une méthode PCR permettant une identification qualitative de tissus de poulet, dinde, canard mulard et oie dans des produits carnés avec un taux d’incorporation de chaque espèce cible variant de 0,1 à 100%. Cette méthode d’identification est couramment utilisée aussi pour tester l’adultération du foie gras de canard et d’oie avec du foie provenant d’autres espèces dans des produits transformés. Rodriguez et al. (2003a ; 2003b) ont mis au point un test PCR permettant de détecter la présence de foie de porc ou de poulet dans des produits à base de foie gras avec un taux d’incorporation minimal de 0,1%. Rodriguez et al. (2003c ; 2004) ont aussi développé une PCR leur permettant de différencier foie gras de canard mulard et foie gras d’oie et de quantifier les taux respectifs d’incorporation. Chisholm et al. (2008) ont développé des tests PCR en temps réel pour détecter de façon spécifique la viande de faisans (Phasianus colchicus) ou de cailles (Coturnix coturnix) dans des produits alimentaires. Ces tests sont basés sur la détection du gène mitochondrial pour le cytochrome b. Ils fonctionnent pour des produits crûs, cuits au four ou autoclavés. Les techniques basées sur l’ADN sont très sensibles, rapides et elles permettent de détecter l’incorporation de viande de différentes espèces dans les produits avec de larges plages de variation. L’ADN est présent dans la majorité des tissus biologiques et il est thermostable. Ces techniques sont maintenant utilisées en routine par les laboratoires chargés des contrôles de fraude éventuelle. Sentandreu et al. (2010) ont utilisé une approche protéomique pour mettre en évidence un ajout de viande de poulet (0,5 à 10%) dans de la viande hachée de porc (90 à 99,5%) sous forme crue ou cuite et basée sur l’utilisation de peptides biomarqueurs.
La substitution de muscle par du collagène dans les produits carnés peut être testée en quantifiant la teneur en 4-hydroxyproline qui est l’acide aminé majoritaire du collagène (Ballin, 2010) et celle par des abats grâce à la spectroscopie dans le moyen infra-rouge (Al Jowder et al., 1999). Chez les volailles, ce type de substitution présente peu d’intérêt.
La substitution de graisse animale par des huiles végétales dans les produits carnés peut être révélée par le dosage de phytostérols (stigmasterol, β-sitostérol) présents uniquement dans les huiles végétales (Nair et al., 2006).
La substitution de protéines animales par des protéines végétales dans les produits carnés peut être révélée par des tests ELISA spécifiques (exemple : protéines de soja, Belloque et al., 2002).
La détection d’irradiation de la viande de volailles peut être réalisée par spectroscopie de résonance paramagnétique électronique (Marchioni et al., 2005a ; 2005b) ou en mesurant les composés hydrocarbonés et les 2-alkylcyclobutanones par chromatographie gazeuse (Horvatovich et al., 2000).
Pour distinguer une viande fraîche d’une viande congelée, la méthode la plus couramment utilisée est celle de la mesure de l’activité enzymatique de la β-HydroxyAcyl-CoA-DésHydrogénase (HADH) dans le jus exsudé par la viande (Ballin, 2010). Il est possible de mesurer l’activité d’autres enzymes telle que la citrate synthase (Simoniova et al., 2013 ; Figure 3) ou d’utiliser des méthodes chimiométriques (Boerrigter-Eenling et al., 2017 ; Figure 4). Ivanova et al. (2014) ont mesuré l’évolution du ribose impliqué dans une réaction de Maillard avec les protéines et initiée par la congélation. Ils ont ensuite calculé les valeurs BME (« Bovine Melanoidin Equivalent ») des cuisses et filets de poulets frais et congelés. Lorsque ces valeurs sont inférieures respectivement à 30 et 51 mg BME/g, les morceaux ont été congelés puis décongelés. La SPIR a également été testée avec succès permettant de classer 94,4 % des filets de poulets frais et 96,8% des filets de poulets congelés-décongelés (Atanassova et al., 2018).
Il y a peu d’études dans la littérature concernant l’authentification des procédés de cuisson. Des produits de la réaction de Maillard ou l’acrylamide qui se forme au-delà de 120°C pourrait être utilisés comme marqueurs.
Les composés organiques pouvant être utilisés comme additifs sont nombreux (colorants, arômes, conservateurs, enzymes) et les méthodes de détection doivent être spécifiques.
Afin de limiter les additions d’eau frauduleuses, la règlementation fixe un ratio eau/protéines. Pour les volailles, ce ratio permet de détecter aussi les méthodes de refroidissement des carcasses. En Europe, seul le refroidissement par air est autorisé. Le refroidissement par bain d’eau est largement utilisé en Amérique du nord. En Europe, il est autorisé pour l’exportation de poulets congelés. Avec la sélection sur la vitesse de croissance, l’âge à l’abattage du poulet standard ne cesse de décroître. Ceci a pour conséquence une augmentation du ratio teneur en eau/teneur en protéines des filets qui selon la législation européenne ne doit pas dépasser 3,40 (Règlement CE No 543/2008, Annexe 8). Hahn et al. (2013) ont montré que ce ratio avait progressé pour la production de poulets standards en Allemagne de 3,10 en 1993 à 3,31 en 2012, avec une proportion accrue de filets dépassant la valeur limite autorisée par la législation.
Figure 3 : Effet de la congélation et de la conservation sur l’activité de la citrate synthase dans la viande de poulet (Simoniova et al., 2013)
Figure 4 : Discrimination de filets de poulets frais réfrigérés ou congelés-décongelés grâce à une analyse en composantes principales de l’activité enzymatique de β-hydroxyacyl-CoA-déshydrogénase
(données centrées et normalisées de la première minute de la réaction enzymatique ; Boerrigter-Eenling et al., 2017)
CONCLUSION
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